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Le Grand Stop


« Inventez de nouvelles solidarités. Prenez des nouvelles.  Lisez, retrouvez aussi ce sens de l’essentiel. C’est important dans les moments que nous vivons. »

E. Macron, 16 mars 2020, premier jour de confinement…

Le Président nous invite à la lecture. Alors en bon citoyen, conscient du fait que nos librairies favorites sont fermées, je m’en viens vous proposer quelques lignes pour profiter de cette période de confinement pour penser, collectivement. Il s’agit de prendre le contre-pied de cette phrase de notre président : comment faire pour qu’il n’y ait pas que dans ces moments de crise que nous soyons invités à lire, à penser au sens de nos vies ? Penser comment, effectivement retrouver le sens de l’essentiel, mais pas seulement dans ces temps difficiles que nous vivons, non ! Tous les jours. Ici, maintenant, mais aussi et surtout demain, et après ; quand nous nous retrouverons.


Ca s’appelle « Changement clim-éthique ». Parce que le climat change, atmosphériquement et politiquement. Cet essai traite des liens étroits entre le changement climatique et le creusement des inégalités. Il traite de justice, sociale et environnementale. Il traite des droits de l’homme et de la paix finalement. De l’avenir de notre espèce, bien sûr, en lien étroit avec la nature. Le passage de l’adaptation à la mondialisation vers une nouvelle grande transformation qui seule nous permettra de pouvoir envisager un avenir réellement désirable, appelle à de nombreux retournements. Le premier d’entre eux reflète la nécessité de changer d'échelle, d’agir global et de penser (le) local, pour réconcilier le sens et l’urgence ; il constitue le sous-titre et l’ossature de l’essai que je vous propose.


Ca appelle à une redistribution. Non seulement de grandes masses financières mais aussi, des terres, du temps ; du pouvoir, qu’il nous faudra repenser. Ca appelle au renforcement des capacités d’agir de tout un chacun, à toutes les échelles et surtout, aux interfaces entre toutes les échelles. Ca appelle une réappropriation des objectifs et des moyens de la production, de son sens ; du sens du travail. Du sens de l’essentiel.


Au final, ça engage la responsabilité de chacun d’entre nous. Responsabilité envers les générations futures, envers la nature. Envers le sud, envers les plus vulnérables, partout. Responsabilité envers l’autre, envers soi. Responsabilité envers notre espèce, envers la pensée également. Responsabilité, du global au plus intime. Vous le verrez, c'est très endettant mais... il en va de notre liberté ! Elle aussi, à redistribuer...


A la fin de ces lignes, j’évoque l’idée d’un grand stop pour que l’on puisse penser collectivement, ces grandes questions qui concernent notre avenir, dont T. Monod nous disait que les gouvernants n’aiment guère que nous y réfléchissions trop. C’est une tentative un peu désespérée, après avoir proposé plein de pistes sur les plans éthique, économique, politique, juridique, philosophique même : « D’accord mais concrètement, on fait comment ? ». Un grand stop donc, pour commencer. Totalement irréaliste…


Mais voilà qu’il est là. Qu’il nous arrive sous une forme encore moins invisible que celle par laquelle la nature se rappelle à nous à travers l’oubli de l’air : un virus. Dans tout le respect des vies qui s’en vont et du courage de tous ceux qui se démènent pour limiter les dégâts, alors que chacun d’entre nous se demande comment il peut aider de son mieux, au-delà de rester chez lui, je me suis dit que je me devais de partager ces lignes avec vous en attendant, je l’espère, de les voir publiées un jour.


L’idée, c’est donc de vous proposer un chapitre tous les trois jours, pour couvrir la période du confinement. Et d’accompagner chacun de ces chapitres de courts textes, comme une contribution à ces réflexions sur l’après : en quoi l’actuelle crise sanitaire nous parle-t-elle de notre coupure d’avec la nature, des inégalités d’accès à différentes ressources, dont le soin, à l’heure où nous espérons tant que ce virus épargnera les pays du sud. Que nous dit-elle de nos capacités d’action et de réaction à différentes échelles ? De notre capacité d’anticipation aussi, sans même parler de notre volonté de collaborer ? Autant d’interrogations qui ne manquent pas de se poser autour des grandes questions socio-environnementales…


Collaborer... On le sent bien aujourd'hui et c'est un véritable facteur d'espoir en ces temps difficiles, la solidarité et l'intelligence collective se mettent en branle, tandis que chacun réalise ce qui lui manque vraiment. Comment les poursuivre, les amplifier, en transmettre le désir à nos gouvernants pour changer d'échelle ?


L'idée est bien de faire en sorte que l’on ne reparte pas comme avant, lorsque nous nous retrouverons. Il faut le rappeler ici : depuis deux siècles, les seuls moments où les teneurs atmosphériques en CO2 ont cessé de grimper, avant ensuite de repartir de plus belle à la hausse, correspondent à des grandes "crises" : les deux guerres mondiales, les chocs pétroliers, la crise de 2008... Nous allons bientôt y ajouter les crises sanitaires comme celle que nous traversons actuellement. La seule question qui importe du coup et qui se déclinera de mille manières ensuite, peut être formulée ainsi : saurons-nous développer l'intelligence collective, à toutes les échelles, pour inverser la tendance volontairement et durablement ? Je pourrais ajouter démocratiquement, voire pacifiquement.


Ne pourrions-nous imaginer du coup, une sorte de sas, un déconfinement en douceur qui nous permette, non seulement d’encaisser le choc, mais aussi tous ensemble, à l’échelle de son quartier, de sa ville et bien plus largement encore, de s’asseoir et de penser, comme étape fondamentale avant de passer à l’action. C’est toute l’idée de mettre à profit ce grand stop qui nous est « offert » de façon si dramatique : et si nous décidions, gouvernants et gouvernés, d'inverser la stratégie du choc décrite par N. Klein ? Pour éviter la déconfiture en déconfinant : l’an 01 plutôt que l’an 40.


Si vous voulez bien en commencer la lecture : prêt-en-bulles et partie I, chapitre 1


"Le jour d’après, quand nous aurons gagné, ce ne sera pas un retour au jour d’avant. Nous serons plus forts moralement, nous aurons appris et je saurai aussi avec vous en tirer toutes les conséquences, toutes les conséquences."


Ce n’est pas moi qui le dit n’est-ce pas...  

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